Découvrez les raisons de l’exclusion des femmes du mont Athos

L’interdiction faite aux femmes d’accéder au mont Athos, cette péninsule située dans le nord de la Grèce et peuplée de monastères orthodoxes, suscite depuis des siècles interrogations et débats.

Quelles sont les raisons profondes de cette exclusion ?

Est-elle justifiée par des considérations religieuses, culturelles ou historiques ?

Cet article se propose d’explorer en détail les différents éléments qui permettent de comprendre et d’expliquer pourquoi le mont Athos, véritable bastion de la spiritualité orthodoxe, demeure encore aujourd’hui interdit aux femmes.

Une tradition ancestrale : l’origine de l’interdiction

Pour comprendre les fondements de cette exclusion, il convient de remonter aux sources de la tradition monastique du mont Athos.

Le mont Athos, appelé la Sainte Montagne, est un lieu de pèlerinage et de retraite spirituelle depuis le début du christianisme. Au fil des siècles, il a vu se développer une communauté monastique unique en son genre, composée exclusivement d’hommes. Cette tradition remonte à l’époque où les premiers ermites, venus de différentes régions de l’Empire byzantin, se sont installés sur la péninsule pour mener une vie d’ascèse et de prière.

C’est au IXe siècle que l’interdiction faite aux femmes d’accéder au mont Athos a été officialisée, sous l’impulsion de l’empereur byzantin Michel III. Cette décision a été prise dans le contexte de la réforme monastique initiée par l’empereur, qui visait à renforcer le caractère sacré et solennel de la vie monastique sur la péninsule. Selon certaines sources, il aurait été inspiré par une vision de la Vierge Marie, qui lui aurait demandé de consacrer le mont Athos à la prière et à la contemplation, en écartant toute présence féminine.

La Vierge Marie, protectrice du mont Athos

Le rôle de la Vierge Marie dans l’interdiction faite aux femmes d’accéder au mont Athos mérite une attention particulière.

  1. La Vierge Marie, appelée Panagia dans la tradition orthodoxe, est considérée comme la protectrice et la patronne de la Sainte Montagne. Selon la légende, elle aurait été conduite sur les rivages du mont Athos par une tempête alors qu’elle se rendait en Chypre pour visiter saint Lazare. Émerveillée par la beauté des lieux, elle aurait demandé à son Fils, Jésus-Christ, de lui accorder cette terre en héritage.
  2. La Vierge Marie est vénérée comme la Mère de Dieu et la porteuse de la Lumière divine. En accordant au mont Athos le privilège d’être le lieu exclusif de la présence masculine, elle aurait voulu signifier que la vie monastique doit être entièrement consacrée à la recherche de la communion avec Dieu, sans être troublée par les tentations et les distractions du monde extérieur.
  3. La présence de la Vierge Marie sur le mont Athos est attestée par de nombreux miracles et apparitions qui lui sont attribués. Les moines de la Sainte Montagne considèrent qu’elle veille sur eux et les guide dans leur quête spirituelle, et qu’elle est la garante de la pureté et de l’authenticité de la vie monastique. En ce sens, l’interdiction faite aux femmes d’accéder au mont Athos peut être comprise comme une manifestation du respect et de la dévotion que les moines vouent à leur protectrice.

Les arguments religieux et spirituels en faveur de l’interdiction

Plusieurs arguments d’ordre religieux et spirituel sont invoqués pour justifier l’interdiction faite aux femmes d’accéder au mont Athos.

  1. Le premier argument est celui de la continuité historique. Les moines de la Sainte Montagne considèrent que l’interdiction est en vigueur depuis l’époque de l’Empire byzantin, et qu’elle fait partie intégrante de leur héritage spirituel. Pour eux, il s’agit d’une règle intangible, qui doit être respectée par tous, sans exception.
  2. Le second argument est celui de la théologie. Les moines du mont Athos estiment que la présence des femmes serait incompatible avec la nature même de la vie monastique, qui consiste à se détacher des passions et des désirs terrestres pour se consacrer entièrement à Dieu. Selon eux, la présence des femmes pourrait engendrer des tentations et des distractions, et compromettre ainsi la pureté et la ferveur de la prière.
  3. Le troisième argument est celui de la pratique ascétique. Les moines du mont Athos mènent une vie d’ascèse et de renoncement, qui implique la maîtrise des passions et la transformation des désirs en énergie spirituelle. Pour eux, l’interdiction faite aux femmes d’accéder au mont Athos est une condition nécessaire pour préserver l’intégrité et l’exigence de cette voie spirituelle.
  4. Enfin, le quatrième argument est celui de la tradition monastique elle-même. Les moines du mont Athos considèrent que leur vocation est de perpétuer et de transmettre un mode de vie et une sagesse ancestrale, qui ont été légués par leurs prédécesseurs et qui sont inscrits dans les règles et les usages de la communauté. Pour eux, l’interdiction faite aux femmes d’accéder au mont Athos est une manifestation de cette fidélité à la tradition, qui garantit la pérennité et l’authenticité de leur engagement spirituel.

Les enjeux socioculturels et politiques de l’interdiction

Outre les arguments religieux et spirituels, l’interdiction faite aux femmes d’accéder au mont Athos peut être analysée sous l’angle des enjeux socioculturels et politiques qu’elle soulève.

D’une part, cette interdiction reflète les représentations et les valeurs qui prévalaient dans la société byzantine et qui ont été transmises jusqu’à nos jours. À cette époque, la femme était considérée comme un être inférieur, soumis à l’autorité de l’homme et incapable de s’élever à la hauteur des exigences spirituelles de la vie monastique. Cette vision patriarcale et androcentrée a ainsi contribué à renforcer l’exclusion des femmes du mont Athos, en la justifiant par des arguments religieux et moraux.

D’autre part, l’interdiction faite aux femmes d’accéder au mont Athos a des implications politiques et diplomatiques. En effet, cette mesure a été maintenue et défendue par les autorités ecclésiastiques et politiques grecques, qui considèrent le mont Athos comme un symbole de l’identité et de la souveraineté nationales. Dans ce contexte, l’interdiction faite aux femmes de pénétrer sur la péninsule apparaît comme un enjeu de pouvoir et de contrôle, qui sert à affirmer l’autorité de l’Église orthodoxe et de l’État grec sur ce territoire.

Enfin, l’interdiction faite aux femmes d’accéder au mont Athos soulève des questions d’ordre éthique et juridique. Certains considèrent en effet que cette mesure constitue une discrimination fondée sur le sexe, qui va à l’encontre des principes d’égalité et de respect des droits humains. D’autres estiment qu’elle témoigne d’un attachement excessif à la tradition, qui empêche les moines de la Sainte Montagne de s’adapter aux évolutions de la société et de remettre en question certaines de leurs pratiques.

L’interdiction faite aux femmes d’accéder au mont Athos est un phénomène complexe et multifacette, qui s’inscrit dans une longue tradition monastique et religieuse, mais qui soulève des enjeux socioculturels et politiques. Si l’on peut comprendre et respecter les motivations spirituelles qui sous-tendent cette interdiction, il est légitime de s’interroger sur ses implications éthiques et juridiques, et de réfléchir aux moyens de concilier le respect de la tradition avec les exigences de l’égalité et de la modernité.

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